Les recruteurs se font désormais appeler « conseiller en recrutement », or ce terme est souvent usurpé. Je vous propose ici
succinctement un topo sur en quoi devrait consister un travail de conseil en recrutement, puis comment procèdent ceux que je nomme marchands de CV.
Le vrai conseiller en recrutement.
Profil du conseiller :
Pour bien faire son travail, le conseiller en recrutement doit avoir une solide expérience professionnelle qui lui aura permis de développer
des aptitudes psychologiques, et surtout une très bonne connaissance générale micro et macro économique. Il peut être débutant mais dans ce cas; il lui sera nécessaire d'être titulaire d’un ou
plusieurs diplôme(s) de niveau Master. Il doit savoir comment fonctionne une entreprise et comprendre son environnement. Il doit également suivre l’économie et le marché de l’emploi afin de
pouvoir anticiper les besoins de ses clients. Rappelons que le conseiller a pour mission d’aider ses clients, il doit ainsi être pédagogue pour leur faire prendre conscience de leurs
besoins futurs.
Les meilleures formations :
Les formations en management (ESC, IAE): ces
formations sont intéressantes pour cette fonction car elles sont très généralistes. On y enseigne des matières telles que l’économie, la finance, le marketing ou le fonctionnement
d’une entreprise. On y acquiert également des notions de psychologie au travers de matières telles que les techniques de management et de négociation.
Les psychologues : certains cabinets pensent qu’il faut être diplômé en psychologie pour
être un bon recruteur. Je n’en suis pas sûr car je pense d’une part personnellement que les psychologues sont plus utiles à d’autres postes et d’autre part que l’humain reste l’humain, l’avis
d’un psychologue ne permettra pas de « blinder un recrutement » comme on cherche trop souvent à le faire.
Les écoles d’ingénieur : les ingénieurs ont également une bonne formation généraliste et
peuvent évaluer les aptitudes techniques d’un candidat dans des domaines variés. Cela dit dans les étapes d’un process de recrutement, il est préférable, voir indispensable, qu'il y ait un
entretien de personnalité, suivi par un entretien technique, cela permet d'avantage d'objectivité.
Les diplômes universitaires en Ressources Humaines : attention ces formations sont très
hétéroclites. Il y a d’excellentes formations comme le CIFFOP à Paris ou le Master RH de l’université de Bourgogne par exemple ("Liaisons Sociales" publie un classement régulièrement
mis à jours).Cela dit ces formations sont plus orientées administration RH pure et dure, donc moins généralistes.
Quant à l’IGS, méfiance. Cette école n’appartient pas à la « Conférence des Grandes Ecoles » et ne fait partie d’aucune
université, je ne la classe donc pas dans les masters RH étant donnée qu'elle n’est pas habilitée à délivrer le « Grade de Master ».
Les principales aptitudes du conseiller en recrutement
Dans cette partie, je ne traiterai que de la phase d’entretien et non de la phase en amont qui consiste à définir le poste. Cette description
est aussi loin d’être exhaustive, je la compléterai certainement par la suite.
Savoir être :
Respect du candidat : le recruteur représente l'entreprise, il doit
donner la meilleure image de son cabinet ou de l’entreprise qui l’emploie.
Avoir de l’empathie : être capable de comprendre le parcours d’un
candidat, ce qui sera utile pour identifier le caractère d’un candidat de la manière la plus objective possible.
Etre curieux : Il faut être capable de comprendre les rudiments
techniques du poste afin de pouvoir le présenter au candidat.
Savoir faire :
Mettre le candidat à l’aise : le but d’un entretien est de réussir à
savoir ce qu’un candidat a « dans les tripes ». Si le candidat a l’impression de passer sur le grill, il se mettra sur sa défensive et il
pratiquera une langue de bois digne d'un politicien. Il peut également dire un fameux mot en 5 lettres, se lever et laisser le recruteur "le bec dans l'eau".
Vendre le poste : c’est primordial pour deux
raisons :
1. Il faut attirer le bon candidat et lui donner envie de venir apporter ses compétences à l’entreprise pour laquelle on recrute plutôt que pour une
autre.
2. La motivation du candidat commence le jour de l’entretien de recrutement. Un bon candidat peut accepter le poste faute de mieux en raison d’un marché de
l’emploi tendu et commencer son travail à reculons. Une fois embauché, il ne sera ainsi pas dans les conditions d'exploiter tout son potentiel.
Mener un entretien de recrutement :
1. Présenter l’entreprise et le poste afin que le candidat ait toutes les cartes en main pour qu’il puisse identifier ses expériences susceptibles d’être
transférables au poste proposé.
2. Demander au candidat de se présenter succinctement et avoir lu son CV avant ; ça ne fait pas très sérieux de demander au candidat de quelle école ou
université il est diplômé alors que c’est écrit sur son CV. Identifier ses choix dans son parcours, et savoir l’interrompre poliment s’il dévie du sujet (time is money).
3. Lui demander comment il se voit dans le poste et éventuellement lui poser quelques questions techniques. Au travers de cette question, on
peut évaluer son niveau de motivation et voir s'il a la tête sur les épaules.S'il dit qu'il sait tout faire, il ne s'agit pas de se laisser duper, Chuck Norris et McGyver ça
n'existe qu'à la TV. Attention, l'entretien ne doit pas non plus prendre la tournure d'un "quizz" avec des bonnes et des mauvaises réponses, et ce même dans le cadre d'un entretien
"technique" avec le futur supérieur hièrarchique.
Coacher le candidat : des excellents profils ne savent pas forcément
se vendre, c’est alors le rôle du recruteur de le conseiller afin qu’il donne le meilleur de lui lors des autres entretiens du process de recrutement. Un bon recruteur pourra ainsi donner
des informations liées au dress code par exemple sur les points forts de son parcours qu’il devra mettre en avant.
Savoir :
Connaissance des métiers : comment comprendre un parcours varié sans
connaître les différentes fonctions pouvant exister dans les entreprises ?
Connaissances économiques : benchmark du marché, pour savoir si un
candidat se sous évalue ou se sur évalue. Cela peut aussi permettre de savoir pourquoi il y a des trous sur un CV, un recruteur ne comprenant pas qu'un cadre n'ait pas trouvé de travail
en 2009 démontrera, par ce simple fait, son incompétence.
Connaissance à jours des formations et de la valeur des diplômes :
Il y a une multitude de formations, il faut déjà savoir si elles sont reconnues par l’Etat ce qui est un gage de qualité et peut aussi être indispensable pour l’exercice de certaines fonctions.
Il faut également connaître les grandes lignes du programme.
Le marchand de CV
Au cours de mon expérience professionnelle, j’ai eu à travailler avec des cabinets de recrutement et j’ai pu constater que toute l’étape
préalable au recrutement en lui-même ; à savoir ; le conseil en définition de poste était régulièrement occultée.
Voici un exemple d'un « conseiller en recrutement » que je classe dans la catégorie « marchand de CV » censé
aider son client à mener à bien son recrutement.
Identification du poste :
· Question : Vous recherchez pour quelle fonction ? Réponse : commercial
· Question : Quelle est votre activité ? Réponse : du conseil aux entreprises type TPE
· Question : vous voulez qu’il ait quoi comme diplôme ? Réponse : commercial ou spécialisé dans notre offre de service.
· Question : Quelle expérience professionnelle ? Réponse : je ne sais pas une dizaine d’années je pense avec une connaissance dans notre
domaine d’activité.
Je viens de vous résumer les principales lignes de la définition de l’offre élaborée avec le « conseiller en recrutement ». Comme
vous pouvez le constater, il n’y a pas vraiment de conseil, c'est-à-dire de regard extérieur.
Un conseiller, tel que je l’entends, cherche à comprendre les tenants et aboutissants du poste et ainsi essayer de faire prendre du recul à
son interlocuteur, en lui expliquant qu’on pourrait peut être rechercher ce type de profil auquel le client n’aurait pas pensé.
Le cabinet de recrutement nous a présenté une liste correspondant exactement à ce que nous avions demandé, un peu comme lorsqu’on achète une
voiture.
La différence entre un être humain et une machine, c’est qu’une machine est opérationnelle en sortant du carton et ne fera ni plus ni moins
que ce pour quoi elle a été conçue. Un être humain, lui, évolue et est susceptible d’une part de développer de nouvelles aptitudes et d’autre part de devenir source de créativité pour
l’entreprise en apportant des compétences et des savoirs acquis dans d’autres entreprises.
Coût de la dizaine de CV : environ 15 000 euros HT.
Je rajouterai que j’ai obtenu les coordonnées de ce cabinet par une amie y ayant travaillé ; j’ai indiqué au cabinet le nom de cette amie. L’interlocuteur m’a naturellement confirmé qu’il la
connaissait. Elle n’a même pas reçu un petit Email de remerciement, alors que sur les 15 000 euros, il aurait été classe d’investir 50 euros pour lui offrir un petit bouquet de fleurs…Un réseau c'est comme l'amitié, ça s'entretien.